Si le gin est une invention hollandaise et traditionnellement une boisson des plus britanniques, il a désormais séduit à peu près toute la planète. On en boit et on en distille partout, en ajoutant des herbes, épices et autres aromates (souvent avec un accent local) à la traditionnelle base de genièvre. À la SAQ, on trouve aujourd’hui des gins d’une bonne quinzaine de pays, de l’Afrique du Sud au Japon en passant par le Portugal, l’Allemagne et le Brésil. Sans compter une sélection croissante de gins québécois qui ne donnent pas leur place, tant en qualité qu’en originalité, et dont certains s’exportent d’ailleurs vers d’autres provinces et pays.

Une grande diversité

La diversité des arômes du gin provient tout autant de la grande diversité d’ingrédients qui le composent (on trouve parfois des dizaines d’aromates dans un seul gin) que de la diversité des méthodes utilisées pour le parfumer. Les arômes peuvent être ajoutés avant, pendant ou après la distillation, généralement par macération, mais aussi en faisant passer la vapeur d’alcool, distillée dans un petit réservoir (le « panier ») accroché à l’alambic où l’on aura placé les herbes et épices afin d’infuser les vapeurs du spiritueux en devenir. Selon l’approche, on aura des arômes plus concentrés ou plus raffinés, plus affirmés ou plus subtils, ce qui crée autant de façons différentes de donner une personnalité distinctive à un produit. Pas étonnant que les amateurs se plaisent autant à régulièrement en découvrir de nouveaux.

Conservation du gin

Comme la grande majorité des spiritueux, le gin est un produit très stable, qui ne risque pas de devenir défectueux avec le temps, que la bouteille soit ouverte ou fermée. Puisque le gin comporte souvent des parfums plus délicats, une bouteille ouverte plusieurs mois pourrait toutefois commencer à perdre un peu de sa complexité aromatique.

Un remontant des Pays-Bas

L’origine du gin remonte au 16e siècle, aux Pays-Bas. On l’attribue généralement à un médecin et professeur de l’Université de Leyde, Franciscus Sylvius, expert en potions médicinales. Il aurait été le premier à distiller un alcool aromatisé au genièvre, autour de 1650. On croyait alors qu’il aidait les troubles digestifs et les problèmes de reins. Relativement peu couteux et facile à produire, le gin se répandit très rapidement dans les Pays-Bas et surtout, en Angleterre. Ces pays protestants avaient fortement taxé les importations de boissons alcoolisées de la France catholique, ce qui donna un élan supplémentaire au gin comme remplaçant de choix.

Favori des classes populaires anglaises, vers la fin du 19e siècle, le gin prend une image plus distinguée grâce à la mode des cocktails. En particulier, on pense au célèbre martini, qui commence sous un jour plutôt doux, avant de devenir aussi dry que possible vers le milieu du 20e siècle.

Aujourd’hui, l’Angleterre demeure toujours un grand producteur et le principal exportateur mondial de ce spiritueux. Les États-Unis, l’Espagne, les Pays-Bas, l’Allemagne et, de façon plus surprenante, les Philippines sont également parmi les autres grands pays producteurs et amateurs de gin.

Une panoplie de styles

Les arômes classiques du gin comprennent évidemment le genièvre, qui lui donne ses belles notes fraîches de conifères. L’angélique, l’anis, la coriandre, le fenouil, l’écorce de cannelle et les zestes d’agrumes font aussi partie des arômes courants des gins traditionnels.

Parmi ces styles traditionnels, on trouve avant tout le London Dry Gin, qui demeure la référence et le style le plus courant dans le monde. Ses notes florales et légères et son côté plus sec en bouche proviennent de la méthode de fabrication qui voit les éléments aromatiques (provenant exclusivement de matériaux végétaux naturels) être ajoutés exclusivement au moment de la dernière distillation, sans autre modification subséquente du goût. Le Genever, style traditionnel des Pays-Bas et de Belgique, met pour sa part l’accent fort sur les notes de genièvre. On le produit tout autant en style jeune qu’en style âgé (oude) avec un vieillissement en barriques. Autre style vieilli en barriques, le Old Tom Gin est coloré par son passage dans le chêne et souvent un peu sucré. On peut aussi mentionner le Plymouth Gin, passablement aromatique et appartenant exclusivement à la marque du même nom.

Depuis une vingtaine d’années, le style des gins a toutefois explosé dans un élan de créativité et d’adaptation locale qui ne semble pas vouloir s’arrêter. L’alcool de base peut varier autant que les aromates: bien que la plupart des gins soient toujours produits à base d’alcools de grain, on en trouve maintenant fait d’alcools de raisin, de petits fruits, voire de miel. En ce qui concerne les arômes, on a ajouté de tout dans les gins modernes, des fleurs aux algues en passant par le raifort, la truffe, les branches de cèdre ou même le cannabis. De quoi faire tourner la tête avant même d’y goûter!

Cocktails: classiques ou créatifs

Le gin est à la base de plusieurs cocktails classiques: martini (avec juste une petite touche de vermouth, en version dry), gimlet (lime), negroni (vermouth et Campari), French 75 (citron et champagne), Ramos Gin Fizz (avec son incroyable mousse crémeuse) et bien sûr, l’incontournable et rafraîchissant gin tonique. Ce dernier jouait au départ sur ses qualités médicinales, puisque la quinine incluse dans le tonique servait à calmer les symptômes de la malaria: une façon plutôt agréable de se soigner.

Malgré ses arômes souvent assez affirmés, le gin se montre tout de même assez polyvalent en mixologie. Il peut soutenir bon nombre de notes fruitées, en particulier celles des agrumes et des fruits tropicaux comme la mangue. Les spiritueux amers et herbacés viennent créer un beau contrepoint aux notes de sapinage et d’épices du gin, tandis qu’on peut créer d’innombrables variations du martini en ajoutant une touche d’autres alcools ou boissons – comme de la Chartreuse dans l’excellent Bijou ou de la canneberge dans le célèbre Cosmopolitan. Et n’oublions tout de même pas que les meilleurs gins se savourent agréablement seuls, sur glace, pour bien profiter de leurs saveurs complexes et harmonieuses.


Suggestions de cocktails à base de gin

Madrid Fizz

Conseil
Pour se simplifier la vie en mixologie maison: utilisez des versions plus simples, au moins pour commencer. La complexité aromatique de certains gins plus originaux peut donner des merveilles, mais aussi des conflits d’arômes avec d’autres ingrédients. Après, on pourra s’amuser à créer des résonances harmoniques plus pointues, en se servant des côtés citronnés, herbacés ou épicés comme d’un complément ou d’un contrepoint sympathique.

Pour mieux s’y retrouver

Avec toute la diversité des styles disponibles, on peut avoir bien des hésitations, avant de choisir son gin. Une bonne façon de mieux choisir commence par les huit pastilles de goûts créées par la SAQ, du traditionnel au floral, forestier boréal ou herbacé végétal. Pour approfondir ses connaissances, de l’historique aux recettes de cocktails en passant par les styles et les techniques d’élaboration, on peut aussi s’inscrire aux Ateliers SAQ sur le gin, offerts sur une base régulière par l’ITHQ, un peu partout au Québec.

Et pourquoi pas à table?

Tout comme les fines herbes et épices viennent donner du tonus aux plats, leur présence dans le gin peut aussi y répondre agréablement, si on va chercher les bonnes harmonies. L’accord peut être tout simple, comme des petits sandwichs aux concombres avec un gin-tonic lui-même garni de tranches de concombre. Les poissons et fruits de mer, en particulier les crevettes ou le saumon fumé, profiteront d’un accord avec un gin mettant genièvre et agrumes à l’avant-plan – et encore mieux si on les accompagne d’une salade de fenouil ou d’une petite mayonnaise à l’aneth. Les épices indiennes peuvent aussi faire très bon ménage avec le gin, surtout si celui-ci contient certaines de ces épices, comme les graines de coriandre, la cardamome ou le gingembre. Si on combine le gin avec des amaros et/ou du vermouth (comme dans un negroni), les possibilités s’ouvrent aussi vers les charcuteries et les fromages, en particulier les pâtes dures. Pourquoi pas un gouda bien vieilli, afin de rendre hommage aux origines de l’alcool au genièvre?

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