On fait un gin?

D’accord, mais alors à l’hibiscus. Une vodka? Autant qu’elle soit houblonnée. Un prêt-à-boire sur le thème du gin tonic? Alors, donnons-lui des saveurs aussi uniques qu’attrayantes – disons… miel, pêche et romarin et appelons-le Nectar. En quelques mots, voilà l’état d’esprit de la distillerie Oshlag, qui trace depuis quatre ans une voie bien à elle dans le paysage des spiritueux d’ici.

Avec un nom bien ancré dans son contexte montréalais – Oshlag comme dans Hochelaga, du secteur de l’île qui accueille l’entreprise – la distillerie s’est également fixée comme objectif d’être bien ancrée dans le terroir québécois. « Quand on n’utilise que des céréales ou des houblons québécois, ça nous limite, mais ça nous distingue aussi. Il y a un défi, chaque fois, de rendre le produit local, » explique Frédéric Thibault, vice-président marketing du groupe Glutenberg, dont fait partie Oshlag, aux côtés du brasseur Glutenberg et du distributeur Transbroue.

Cet esprit combiné d’originalité et de produit local se manifeste dans le plus récent gin de la maison, le Dentdelion qui fait la part belle au trèfle rouge et, bien sûr, au pissenlit. « Des fleurs qui seraient détruites, » comme le dit Frédéric Thibault, mais qui viennent donner au gin un caractère floral unique, issu de plantes qu’à peu près tout le monde voit dans son voisinage immédiat.

Aventure de groupe

En plus de son originalité, Oshlag possède une double identité, avec un côté brasserie et un côté distillerie – le seul duo du genre au Québec, tout au moins sous le même nom et surtout, sous le même toit, rappelle Thibault. « Ça crée des synergies intéressantes, notamment pour nos prêts à boire » explique Geneviève Laforest, sa collègue d’Oshlag qui agit aussi à titre de vice-présidente de l’Association des microdistilleries du Québec. Pour une distillerie, il est plus facile de mettre des boissons en cannette si on a une brasserie sous la main, en effet.

Distillerie ou brasserie?

Le duo distillerie-brasserie est aussi devenu plus égalitaire, avec la croissance fulgurante des spiritueux d’ici. « En 2016, on était peut-être à 15 % pour la distillerie et 85 % pour la brasserie. Cette année, de la manière dont ça progresse, on devrait être plus près de 50-50, » souligne Frédéric Thibault. Le succès de la gamme Ginto, les cocktails prémixés arrivés sur le marché l’année dernière y sont pour beaucoup dans cette progression.

Au fond, on ne devrait pas trop s’étonner qu’Oshlag ait une personnalité bien distinctive, en se rappelant que la compagnie a été créée en 2016 par Glutenberg, la brasserie qui a révolutionné le monde des bières sans gluten en leur conférant des saveurs capables de confondre les plus sceptiques. Une série de bières créées avec François Chartier, il y a quelques années, repoussait les limites aromatiques de la bière en général – pas juste du sans gluten. Présente l’année dernière dans 33 états américains, la brasserie s’attend à atteindre une distribution dans les 50 états d’ici la fin de 2020. « On pense qu’on fait ça aussi bien que n’importe qui d’autre, n’importe où dans le monde » résume Frédéric Thibault à propos de l’esprit qui anime le groupe.

La simplicité avant tout

Geneviève Laforest souligne que les produits d’Oshlag visent le haut du pavé, sur le plan qualitatif. « On utilise des essences naturelles et nos prêts à boire sont trois-quatre fois moins sucrées que bien des produits de la compétition, » insiste-t-elle. « On ne veut pas de produits gomme balloune, » renchérit Frédéric Thibault. Les deux collègues appellent les amateurs à « garder ça simple » et à ne pas masquer le produit, mais plutôt à en profiter tels quels – justement à cause de ce caractère si distinctif. Un peu d’eau gazeuse, quelques petits fruits en garniture, des petites bouchées en accompagnement, mais pas besoin de mélanges trop extravagants.

Après tout, ce caractère local et original est ce qui vient séduire la clientèle d’ici. « Je me rappelle d’avoir fait une dégustation à la SAQ de Saint-Donat quand on a lancé les Ginto l’année dernière et ç’a été une des plus belles journées de ma vie professionnelle, se rappelle Geneviève Laforest. Les gens étaient tellement fiers de nous et du produit! » Une sorte d’effet d’entraînement localisé, quoi : plus on fait des produits locaux de qualité, plus les gens d’ici vont en acheter et plus ils en achètent, plus il y en aura.