Ce n’est pas tous les jours qu’une entreprise d’ici fête ses 100 ans. Ni qu’elle doive faire face à une pandémie mondiale — la première de son histoire. Bravant la crise avec leadership et détermination, Catherine Dagenais a su définir une vision novatrice pour relever le défi et propulser la SAQ vers de nouveaux sommets.

Vous travaillez au sein de la SAQ depuis 20 ans et avez gravi tous les échelons avant d’être nommée PDG en juin 2018. Qu’est-ce que cela représente pour vous d’être aux commandes d’une organisation centenaire?

Catherine Dagenais: Je me sens privilégiée d’être à la tête de la SAQ à un moment aussi unique de son histoire. Cela me rend fière de franchir cette nouvelle étape avec tous les employés et les Québécois. Je me suis jointe à la SAQ en 2000, d’abord comme directrice de secteur, puis comme responsable des achats et du marketing — j’ai contribué à la mise en place du programme Inspire. J’ai ensuite été nommée chef des opérations, où j’étais responsable de la chaîne d’approvisionnement, des ventes, du marketing, des achats et du développement durable. Au fil du temps, j’ai vu la SAQ évoluer et se transformer.

Justement, parlez-nous de l’évolution de la SAQ et de ce qui lie son histoire aux Québécois.

C.D.: La société d’État est née en pleine prohibition, en 1921. Le Québec a été le premier endroit en Amérique du Nord à dire haut et fort qu’il était contre la prohibition et pour la vente de l’alcool responsable. À ses débuts, la Commission des liqueurs de Québec (son appellation de l’époque) proposait quelque 300 produits vendus par un commis derrière le comptoir — aujourd’hui, c’est 30 000 en provenance de 80 pays. L’évolution de la SAQ reflète l’amour des Québécois pour la découverte des vins et des spiritueux. Il y a un réel engouement. Le client a bien changé. Il y a 100 ans, on lui disait quoi boire. De nos jours, les conseillers dialoguent avec lui pour lui faire «goûter le monde».

Le précédent exercice financier s’est terminé sur une note inattendue: la COVID-19. Avez-vous réussi malgré tout à atteindre les objectifs que vous vous étiez fixés?

C.D.: Juste avant que la pandémie ne frappe le Québec, nous avions atteint les objectifs de performance de notre Plan stratégique 2018-2020. De sorte qu’au cours de l’exercice qui s’est terminé le 31 mars 2020, la Société des alcools a versé 3,6 milliards de dollars en dividendes au gouvernement, au bénéfice des Québécois, tout en diminuant ses coûts d’exploitation de 225 millions de dollars. Pour ce qui est de la satisfaction du client, la SAQ s’est hissée au premier rang du palmarès Wow de Léger, qui mesure l’expérience client de plus de 200 détaillants de la province.

Sur le plan social, nous nous impliquons dans différentes causes liées à la santé, à la culture et à l’éducation. Ce que nous avons mis en place dans les dernières années est un bon levier pour l’avenir.

Qu’est-ce que la crise sanitaire vous a enseigné sur les habitudes de consommation et le fonctionnement de l’organisation?

C.D.: Quand j’ai accepté le poste de PDG, il y a trois ans, je n’aurais jamais imaginé diriger l’entreprise en pleine pandémie! Personne alors ne connaissait le mode d’emploi. Devant la crainte d’une fermeture, les gens ont pris les succursales d’assaut. Très vite, il a fallu s’adapter, écrire le «livre» sur la façon de gérer un commerce dans un contexte de distanciation physique et mettre en place des mesures sanitaires — files d’attente à l’entrée, désinfectant pour les mains, Plexiglas aux caisses pour protéger les employés et la clientèle —, tout en continuant d’offrir une expérience agréable en magasin.

Avec le confinement, les habitudes de consommation ont changé: les gens viennent moins souvent, mais achètent en plus grande quantité. Plusieurs ont découvert notre site transactionnel SAQ.COM. Avec l’explosion des ventes en ligne, nous avons saisi l’urgence d’investir dans notre chaîne d’approvisionnement, de repenser la gestion des stocks dans nos entrepôts et de mettre à niveau notre plateforme informatique.

En quoi cette transformation des infrastructures profitera‑t‑elle à tous les Québécois?

C.D.: Il faut savoir que le monde du commerce de détail est plus dynamique que jamais avec la multiplication des bannières concurrentes et l’augmentation du commerce électronique. Pour nous démarquer, nous devons répondre aux attentes élevées de nos clients. Comment? En personnalisant et en facilitant l’expérience d’achat en succursale et en ligne. Grâce à la modernisation de nos systèmes, nous serons en mesure d’offrir la totalité de nos 30 000 produits sur SAQ.COM, y compris les importations privées et même des produits découverts ailleurs que nous ne tenons pas en magasin. Cela nous permettra aussi d’écourter les délais de livraison à domicile, avec l’objectif d’un service 24 heures.

Ces mesures figurent dans votre nouvelle vision 2021-2023 — votre premier plan stratégique à titre de PDG. Quelles sont vos autres priorités?

C.D.: La responsabilité sociétale est au cœur de nos activités, notre cause première étant l’aide alimentaire. Par notre soutien aux Banques alimentaires du Québec et à la Tablée des Chefs, ou par l’entremise du potager solidaire SAQ et du miel de nos abeilles, nous redonnons à ceux qui ont faim. Ce sont plus de 11,2 millions de dollars qui ont été remis aux BAQ depuis 12 ans. Nous nous impliquons aussi localement, dans toutes les régions du Québec, en appuyant près de 300 festivals et événements.

Femme de terrain, vous placez vos employés au cœur de votre stratégie, comme un des piliers de votre planification pour les années à venir.
Pourquoi?

C.D.: Sans nos quelque 7000 employés, les lumières seraient fermées! Ce sont des gens passionnés qui sont au cœur de nos réalisations. J’aime échanger avec eux et j’essaie d’être à leur écoute autant que possible. Nous les avons sondés pour savoir ce qui leur importe: un environnement de travail valorisant axé sur la santé, la sécurité et le bien‑être, une transparence dans nos communications et de bonnes conditions de travail. Nous mettons tout en œuvre pour attirer, mobiliser et faire grandir nos talents.

Lutter contre la faim au Québec

Fière partenaire des Banques alimentaires du Québec (BAQ), la SAQ met en œuvre plusieurs initiatives chaque année afin d’amasser des fonds qui sont redistribués par les BAQ aux 19 Moissons régionales et à près de 1200 organismes communautaires dans tout le Québec. Grâce à la générosité de ses clients et à l’engagement de ses employés, la SAQ a remis à ce jour plus de 11,2 millions de dollars pour soutenir de nombreuses familles partout dans la province, dont 3,3 millions de dollars pour l’année 2020.

La consigne et le recyclage du verre sont en voie d’être implantés au Québec. Comment la SAQ compte‑t‑elle faire partie de la solution?

C.D.: Nous sommes activement engagés dans tout ce qui concerne le verre et nous utilisons notre leadership pour faire avancer les choses. Par exemple, en partenariat avec l’industrie et le gouvernement, nous travaillons sur des projets pilotes qui permettront de tester des solutions de récupération des contenants consignés en amont de l’élargissement de la consigne qui se fera à l’automne 2022. Nous participons à plusieurs comités de travail qui se penchent sur les questions logistiques, réglementaires et opérationnelles du nouveau système. Nous sommes au cœur d’une véritable révolution pour améliorer le recyclage du verre au Québec!

Qu’est-ce qui vous motive en ce 100e anniversaire de la SAQ?

C.D.: Inspirer la fierté des Québécois! Il y a de quoi être fiers: la SAQ est l’un des plus grands acheteurs de vins et spiritueux au monde. C’est une entreprise 100% québécoise qui appartient aux Québécois et qui soutient activement l’industrie des produits québécois. Nous continuerons de faire grandir cette fierté en contribuant à la relance économique du Québec et en étant présents à la table des Québécois comme nous l’avons été depuis 100 ans, de façon encore plus personnalisée. Nos acheteurs et nos conseillers décèlent les tendances, et les clients découvrent le monde grâce à eux. Les gens aiment échanger sur leurs produits préférés. Ça fait partie des plaisirs de la vie!

Photo: Julien Faugère