Pour Alison Slattery, la Saint-Patrick évoque de nombreux souvenirs. Il y a les trèfles que son grand-père cueillait le long du chemin de fer et qu’elle épinglait à ses vêtements (vert irlandais, évidemment!). L’odeur du pain préparé par sa grand-mère au retour de la messe. Le brouhaha des défilés où se mêlaient cornemuses, danse folklorique et équipes sportives locales. Sans compter les festins : ragoût, colcannon (une purée de pomme de terre et de chou), mais aussi saumon, huîtres et autres fruits de mer. Il faut dire que Tralee, la ville où elle a grandi, est située au bord de l’océan. 

Depuis maintenant 15 ans, Alison vit de l’autre côté de cette « mare », ce qui ne l’empêche pas de célébrer le 17 mars. Pour l’une de ses premières Saint-Patrick à Montréal, cette photographe a offert ses services pour couvrir le défilé. « Je ne sais pas à quoi j’ai pensé : il faisait - 30 °C. Je n’étais vraiment pas préparée pour ce genre de température! » Une autre fois, elle s’est costumée en leprechaun (le fameux petit bonhomme vert qui cache son or au pied des arcs-en-ciel). Si aujourd’hui, elle ne court plus tant les pubs irlandais et les défilés, elle se fait un point d’honneur de cuisiner une spécialité de chez elle ce jour-là. Et, si possible, de la partager avec des ami.e.s. Pour beaucoup de gens, la Saint-Patrick est synonyme de partys, « mais ce n’est pas juste ça », insiste-t-elle.

Alison Slattery est une photographe établie à Montréal depuis plus de 15 ans. Originaire d’Irlande, elle a découvert la gastronomie alors qu’elle enseignait l’anglais en Asie du Sud-Est. En plus de signer plusieurs photos pour la SAQ, elle photographie les restaurants de la métropole pour le magazine en ligne Tastet et compte plusieurs livres de cuisine à son actif, dont Les recettes de Mandy et True North, du chef Derek Dammann.

Créer de nouvelles traditions

« Selon moi, la journée de la Saint-Patrick devrait commencer par un déjeuner irlandais », lance la photographe, qui a immortalisé quantité de bouffe pour la SAQ comme pour de nombreux restaurants montréalais. Elle explique que ce copieux repas comprend des saucisses, du bacon, du boudin noir et du boudin blanc, des hash browns (des galettes de pommes de terre rissolées), des champignons et des fèves au lard. « J’adore ça! Lorsque je rentre à la maison, c’est l’une des premières choses que je veux manger. À l’aéroport, s’il le faut! »

Le fameux déjeuner irlandais d’Alison
Ragoût à la bière noire

Autre rituel qui lui est cher : le 17 mars, elle joue en boucle une liste de musique exclusivement irlandaise, incluant The Pogues, Wolfe Tones, The Dubliners et Sharon Shannon. C’est la trame sonore qui l’accompagne tandis qu’elle cuisine du ragoût de bœuf à la bière noire, une chaudrée de fruits de mer ou encore un bon shepherd’s pie. « Ça ressemble beaucoup à du pâté chinois, sauf qu’à la place du maïs, il y a des carottes et des pois », précise-t-elle. « On le prépare plus souvent avec de l’agneau haché que du bœuf, d’où le nom de pâté du berger. » 

À ses invité.e.s, elle sert de la stout irlandaise ou encore un grog au whiskey (ou « hot whiskey »), l’équivalent du toddy canadien ou d’une ponce québécoise. « C’est de l’eau chaude dans laquelle on verse du whiskey, du miel, du citron et des clous de girofle [ou de la cannelle]. C’est une boisson incroyable, surtout l’hiver ou lorsqu’on est enrhumé. » 

Si, pour Alison, la Saint-Patrick est l’occasion de faire découvrir la culture irlandaise à ses ami.e.s, il y a tout de même certaines traditions qu’elle ne peut perpétuer. « Ici, je ne peux pas trouver des trèfles dans la neige! », souligne-t-elle avec humour.

Photos: Alison Slattery / Stylisme culinaire: Kerrie Ahern