La Champagne continue d’étoffer son offre sur nos tablettes. Ceux qui ne juraient que par les grandes marques privilégient désormais bien souvent la proposition des vignerons indépendants : savoir-faire, authenticité et rapport qualité-prix avantageux.

Comment expliquer l’engouement soudain pour les champagnes d’artisans?

On remarque aujourd’hui une prise de conscience de la part des consommateurs et amateurs, qui s’intéressent de plus en plus à l’histoire et au savoir-faire derrière la bouteille.

Une tendance qui reflète ce qui se passe dans l’ensemble du monde des vins : un attrait pour le petit, l’intime, par opposition au grand, à l’anonyme, à l’entreprise. Le facteur humain est important, un aspect qui fait parfois défaut aux vins plus commerciaux. L’individualité du champagne et l’expression authentique du terroir séduisent aussi, se traduisant par ce penchant qu’on observe pour les vins d’artisans.

« La clientèle a soif de découvertes et elle est plus à l’écoute, ce qui nous permet d’avoir un lien plus fort et de briser les codes », se réjouit David Goirand, chef sommelier à la Maison Boulud du Ritz-Carlton de Montréal. « Je me donne le devoir de faire découvrir cette nouvelle vague de producteurs champenois et de mettre en lumière de plus petites maisons –  telle une vitrine pour les artisans », explique-t-il. En alternance sur la carte du prestigieux restaurant, certains de ses producteurs préférés, « dont Champagne Pascal Doquet et Champagne Bourdaire-Gallois, qui occupent une place privilégiée, autant au verre qu’en accord sur les menus dégustation ». 

Alors que l’importance historique de la Champagne repose en grande partie sur l’assemblage, les champagnes d’artisans ont de plus en plus tendance à miser sur l’individualité; les champagnes monocépage, monomillésime et monovignoble sont désormais assez courants.

Grande maison ou artisan?

Ce qui distingue les grandes marques des champagnes d’artisans, c’est leur statut  de négociant-manipulant (NM), alors que les seconds ont celui de récoltant-manipulant (RM). Ces acronymes se trouvent d’ailleurs sur les étiquettes, afin de guider le consommateur. Généralement, les grandes maisons achètent leurs raisins d’autres vignerons pour produire du champagne en grande quantité, alors que les producteurs indépendants cultivent leurs propres raisins et embouteillent leur production à petite échelle.

L’Aube d’un jour nouveau

Un exemple phare? Champagne Fleury, l’un des plus anciens producteurs de l’Aube, qui embouteille ses propres vins depuis 1929 et qui fut le tout premier producteur champenois à travailler en biodynamie. Aujourd’hui, la quatrième génération, représentée par Morgane Fleury et ses frères Jean-Sébastien et Benoît, assure la continuité et la rigueur de la maison.

« La diversité des goûts, c’est important », affirme Morgane. « Au-delà de la marque, il y a l’identité de la vigne à la bouteille [qui joue un rôle]. Ça se remarque par un engouement chez les jeunes qui souhaitent valoriser leur terroir, notamment dans l’Aube. » Une génération aussi appliquée qu’inspirée, qui façonne déjà le vin de Champagne de demain.

Le pinot noir est maître dans l’Aube, à la fois en raison de la demande historique de ces raisins par les grandes maisons, puis parce que le climat chaud et le sol dense conviennent bien à ce cépage. Les vignerons de l’Aube disent souvent qu’ils se sentent plus proches de leurs voisins chablisiens en Bourgogne que du reste de la Champagne. Cette camaraderie est aussi ancrée dans leur terroir commun : les sols kimméridgiens qui traversent les deux régions, conférant aux champagnes méridionaux une minéralité exceptionnelle.

« En bio, on prend les risques et on les assume. »

— Pascal Doquet, vigneron-propriétaire

Vigneron depuis 1982, Pascal Doquet signe son indépendance en 2004 après le rachat du domaine familial situé sur la Côte des Blancs, à la limite septentrionale de la Champagne. Des terroir en grand cru et premier cru, qu’il a convertis au bio. 

La région est « très marquée par les flux océaniques », souligne Pascal Doquet. « La culture de la vigne est soumise à un climat frais et humide. Ces conditions favorisent la propagation de maladies de la vigne, tel le mildiou, qui peut détruire complètement ou en grande partie nos récoltes », poursuit-il.

Résolument tournée vers des pratiques en harmonie avec la nature, sa philosophie peut être résumée par le terme « viticulture durable ». D’ailleurs, son travail parcellaire et biologique se doit d’être des plus précis. « Une part de notre métier est celui d’équilibriste, afin d’assurer le bien-être de l’environnement, des vignes et surtout des gens qui y travaillent, dit-il. C’est une valeur ajoutée qui n’est pas forcément économique, mais éthique et écologique. » Et ça vient avec sa part de défis! 

Les champagnes de Pascal Doquet sont d’une qualité rare et les bouteilles, difficiles à trouver. La bonne nouvelle? « Nous avons eu la chance de nous introduire dès nos débuts sur le marché québécois et nous y sommes maintenant bien ancrés, explique le vigneron. Tellement, que nous vendons pratiquement plus de bouteilles au Québec qu’en France! »  

Une tendance là pour rester

Fiers de leur patrimoine, de leur histoire et de leur savoir-faire, les producteurs indépendants champenois n’ont pas fini de faire des adeptes. Et c’est grâce à leur audace, à leur ténacité et à leur résilience que les champagnes d’artisans s’imposent désormais, et pour longtemps, dans nos paniers – et sur nos listes de cadeaux!

À l’approche des Fêtes, c’est le moment idéal pour (re)découvrir l’incroyable diversité des champagnes d’artisans.

Quelques champagnes d’artisans à découvrir :